Leçon 8Construire la mémoire
Cinquante bougies
Faisons un petit arrêt en 1966… soit cinquante ans tout pile après la bataille de Verdun. Cette année-là se tient une grande cérémonie devant l’ossuaire de Douaumont. Pour l’occasion, le président de la République, le général de Gaulle, prononce un discours : ce n’est pas anodin, puisqu’il est lui-même un ancien combattant qui a été capturé dans le village de Douaumont !
Son discours va notamment…
Réintégrer le maréchal Pétain dans la mémoire de Verdun (ce qui fera débat par la suite), sans oublier de mentionner ses "défaillances condamnables" de la Seconde Guerre mondiale
Mettre en avant la réconciliation franco-allemande
Projeter vers l’international une image glorieuse de la France
Une autre leçon qu’enseigne Verdun s’adresse aux deux peuples dont les armées y furent si chèrement et si courageusement aux prises. Sans oublier que leurs vertus militaires atteignirent ici les sommets, Français et Allemands peuvent conclure des événements de la bataille, comme de ceux qui l’avaient précédée et de ceux qui l’ont suivie, qu’en fin de compte les fruits de leurs combats ne sont rien que des douleurs. Dans une Europe qui doit se réunir tout entière après d’affreux déchirements, se réorganiser en foyer capital de la civilisation, redevenir le guide principal d’un monde tourné vers le progrès, ces deux grands pays voisins, faits pour se compléter l’un l’autre, voient maintenant s’ouvrir devant eux la carrière de l’action commune, fermée depuis qu’à Verdun même, il y a 1 123 ans, se divisa l’Empire de Charlemagne. Cette coopération directe et privilégiée, la France l’a voulue, non sans mérite mais délibérément, quand, en 1963, elle concluait avec l’Allemagne un traité plein de promesses. Elle y est prête encore aujourd’hui.