Leçon 2Une guerre d'artillerie

C'est inouï, cette brutalité.
Maurice Genevoix, Ceux de 14

Trois minutes avant la fin du monde

Où l’on découvre une colline disputée avec acharnement.

Vue de la crête des Éparges durant un bombardement, 1915. Photo : © Mémorial de Verdun Illustration Artips

17 février 1915. Le jeune Maurice Genevoix, 24 ans, est accroupi avec ses camarades au fond d’un abri, le long de la crête des Éparges. Cette butte est très importante pour le commandement français : c’est l’un des points culminants autour de Verdun, autant dire un poste d’observation idéal pour l’artillerie. Il faut absolument le reprendre aux Allemands.

Et pour cela, les Français ont creusé des sapes, des sortes de tranchées, directement dans la colline, prolongées par des galeries de mines juste sous les positions allemandes. Voilà ce que Genevoix et ses compagnons attendent : 14h précises, l’heure à laquelle les mines doivent exploser. "Et ma gorge s'est serrée tandis que je regardais ma montre, à deux heures moins trois minutes. Tout est vide. Je ne peux pas sentir autre chose, exprimer autre chose que cela”, raconte-t-il.

Soudain, la terre tremble, des nuages de fumée recouvrent les Éparges. "Nous montons vers l'entrée du boyau, sans la voir, bousculés par l'immense fracas, titubants, écrasés, obstinés, rageurs. ‘En avant ! Dépêchons-nous !’ Le ciel craque, se lézarde et croule. Le sol martelé pantelle."

Sous un déluge d’obus, le bataillon de Genevoix monte à l’assaut de la crête et parvient à s’emparer de son objectif : la partie ouest de la colline. Jusqu’au lendemain matin, où la contre-attaque allemande les repousse. Retour à la case départ…

Vue d'un "entonnoir" (trou provoqué par la déflagration d'une mine) de la crête des Éparges dans les années 1920, carte postale. Photo : © Mémorial de Verdun